Nucléaire : 17.000 travailleurs sont intervenus à Fukushima
(Photo, travailleurs partant pour la centrale depuis le site de préparation à 20 km.)
17.780 travailleurs sont intervenus sur le chantier qu’est devenu la centrale nucléaire dévastée de Fukushima Dai-ichi.
Ce chiffre est issu du dernier bilan synthétique de l’état des réacteurs, des piscines de rétention des combustibles nucléaires et de l’avancée du chantier.
Selon la TEPCo 17.780 travailleurs y sont intervenus depuis mars dernier. Un chiffre en hausse continue, puisqu’il était de 3.700 en juin dernier (lire cette note) dont 3.514 dont la dosimétrie était connue. puis de 10.700 travailleurs en septembre dernier (lire cette note). Cette évolution montre certes que l’activité sur le chantier est intense (stockage de l’eau contaminée, décontamination, netoyage du site, couverture intégrale du bâtiment du réacteur N°1 (photo à droite), refroidissement et surveillance des réacteurs détruits et des piscines,installation de systèmes de protection anti-tsunami, renforcement de structures anti-sismique…), mais aussi très probablement une « gestion par la dose » consistant à « répartir » la dosimétrie sur un plus grand nombre de personnes, ce qui constitue d’ailleurs une bonne manière d’affronter le problème.
Le suivi médical de ces 17.780 travailleurs, dont l’irradiation et la contamination ont été mesurés par différents systèmes (dosimétrie individuelle lors des opérations, anthropogammamétrie ensuite) indique les résultats suivants (il reste encore 109 travailleurs dont les résultats en termes de doses internes ne sont pas connus au 30 novembre) :
► 169 travailleurs ont reçu une dose supérieure à cent millisieverts.
► Entre 100 et 150mSv: 139 travailleurs. Entre 150 et 200mSv: 21 travailleurs. Entre 200 et 250mSv: 3 travailleurs. Au delà de 250mSv: 6 travailleurs dont les doses vont de 309 à 678mSv. Ces 9 travailleurs au delà de 250 mSv ont tous reçu cette dose avant juin dernier.
Pour l’instant, la limite pour les travaux d’urgence adoptée par le gouvernement est de 250 mSv, mais elle devrait bientôt passer à 100 mSv.
L’évolution des doses les plus élevées montre que les Japonais sont parvenus à limiter la prise de risque depuis plusieurs mois. En juin dernier les chiffres résultants de ces analyses étaient les suivants : 124 personnes ont subi une dose supérieure à 100 millisieverts, dont 107 entre 100 et 200 mSv, 8 entre 200 mSv et 250 mSv, 9 plus de 250 mSv dont les deux plus élevées à 643 et 678 mSv. Autrement dit, les doses les plus élévées datent toutes d’avant juin. Ces chiffres sont tirés du document ci-contre à droite, cliquer dessus pour zoomer et le consulter (mais il est plus lisible et téléchargeable ici). On peut y lire également une présentation très synthétique de l’état de la centrale, et du chantier en cours.
Je note qu’il y a des contradictions dans les chiffres donnés en septembre qui ne montraient que 103 travailleurs au delà de 100 mSv, comme le 19 août d’ailleurs, mais il pourrait s’agir d’erreurs de retranscription, puisque le dernier chiffre donné, avec 169, redevient logique avec les chiffres de juin. (Photo ci-dessous intervention dans lebâtiment du réacteur N°1)
Quels sont les risques sanitaires représentés par les doses subies ? Alain Rannou, spécialiste en radioprotection à l’IRSN, m’expliquait en juin dernier les connaissances issues de l’épidémiologie : «il n’y a pas de risque identifié de cancer en dessous de 100 mSv pour la leucémie et en dessous de 250 mSv pour les autres cancers radioinduits (pour les adultes, car pour les enfants la limite serait plutôt à 50 mSv). D’où la qualification de « faibles doses » de ces valeurs. Au delà, le risque monte en proportion de la dose reçue. Avec 0,5% de risque supplémentaire (par rapport à une vie sans exposition à cette radioactivité là et une population où le décès par cancer touche entre 25% et 30% des individus) pour 100 mSv, et, pour prendre l’exemple des deux personnes les plus exposées, 3% de risque en plus pour 600 mSv.» Le spécialiste avertit qu’il s’agit là d’une approche statistique valable uniquement pour les grands nombres. Elle ne dit rien des conséquences possibles, ou de leur absence, pour un individu particulier.
Aujourd’hui, le travail sur le site exige toujours de très grandes précautions (combinaison jetables et parfois système respiratoire autonome), mais à des degrés très divers en fonction du lieu précis d’intervention.
Les bâtiments des réacteurs accidentés sont encore très dangereux, mais il suffit d’en être éloigné de quelques centaines de mètres pour que le niveau de radioactivité diminue rapidement. Le travail près des systèmes de décontamination de l’eau s’opère en combinaison intégrale, comme on le voit sur la photo à droite. A l’inverse, les techniciens interviennent en habits normaux dans la salle de contrôle des réacteurs 5 et 6.
Pour visualiser les conditions de travail sur le site, il est possible d’aller visionner les vidéos de la TEPCo (attention: il s’agit de documents entièrement sous le contrôle de cette entreprise, pas d’un travail journalistique d’information.)
► pour retrouver la chronologie de l’accident, rechercher dans cette catégorie.
Les dernières notes sur Fukushima :
► Vidéo de la centrale et sondages nippons.
► Nouveaux calculs sur l’émission radioactive.
► Nouvelles analyses sur l’accident et l’état des réacteurs.
(sciences.blogs.liberation.fr) Sylvestre Huet, le 8 décembre 2011
La Hague et ses paradoxes nucléaires
L’usine Areva de La Hague a fait parler d’elle… lors des négociations entre le PS et les Verts. Un vrai pataquès – avec effacement d’un paragraphe dans un texte pourtant déjà signé, puis explication de texte alambiquée pour un rétropédalage à toute vitesse – lire cette note, puis celle-ci qui racontaient cette histoire.
Pour apporter quelques explications techniques à cette histoire très politique, je suis allé pour Libération faire une petite visite à La Hague. Voici ci-dessous l’article publié hier dans Libération, avec des ajouts de textes et d’images qui ne pouvaient tenir dans l’espace accordé sur le papier. Ainsi que des liens pour des informations complémentaires.
«Tenez-vous à la rampe». Ce conseil émis sur un mode très directif est répété à chaque passage d’escalier, par Lionel Gaiffe, l’énergique directeur technique de l’usine de La Hague d’Areva aux visiteurs qu’il cornaque ce jour-là. Voudrait-il faire oublier que son établissement concentre l’essentiel de la radioactivité générée par les centrales nucléaires françaises ? Qu’on s’y livre à une chimie de haut vol, afin d’y séparer matières nucléaires – uranium et plutonium – des déchets radioactifs ultimes ? Voir dans le conseil du directeur une manœuvre de diversion serait une erreur. Tout juste un de ces paradoxes que porte l’usine de La Hague. Quatre paradoxes à percer pour saisir les dessous du pataquès entre le Parti Socialiste et Europe-écologie-les Verts dans l’ultime épisode de leurs négociations d’un accord électoral.
Le paradoxe de l’échec. Faire d’un échec cuisant, une activité industrielle durable. C’est le paradoxe central de l’usine de retraitement. A l’origine, elle doit moins répondre à l’exigence de «traiter» les déchets ultimes que d’anticiper une pénurie d’uranium. Il y a quarante ans, des ingénieurs – en France, mais aussi aux Etats-Unis, en Russie, au Japon – voient l’avenir du nucléaire avec des milliers de réacteurs «rapides». Car les réacteurs actuels, «à neutrons lents», ne fonctionnent qu’avec les 0,7% de l’isotope 235 de l’uranium naturel, d’où la crainte d’une pénurie et d’un prix trop élevé de l’uranium. Le reste, les 99,3% d’uranium-238 exigent des «réacteurs à neutrons rapides».
Mais, pour les faire marcher, il faut du plutonium, en sus de l’uranium. Si un réacteur rapide peut produire plus de plutonium qu’il ne consomme en régime de croisière, il faut un stock initial. Il doit être extrait des combustibles usés des réacteurs lents où il représente 1% de leur masse. En outre, on récupère les 95% d’uranium encore composé d’environ 1% d’isotope 235, «réutilisé, après ré-enrichissement, pour un tiers en combustibles neuf, le reste est stocké à Pierrelatte», précise Dominique Mockly, directeur de «l’aval» du cycle du combustible chez Areva. (photo : « chateau » de transport de combustible usé).
Cette stratégie de long terme devait doter la France d’une indépendance en matières nucléaires grâce aux stocks de plusieurs centaines de milliers de tonnes d’uranium appauvri – celui qui reste lorsque l’on «enrichit» l’uranium naturel à 4% d’U-235 pour alimenter les réacteurs lents. Elle s’est écroulée puisque le nombre de réacteurs nucléaires dans le monde s’est arrêté vers 430. Et que le prix de l’uranium s’est effondré au rythme d’une offre satisfaisant largement les besoins et du démantèlement des armes nucléaires américaines et russes – l’équivalent de 150.000 tonnes d’uranium naturel, près de 5 ans de production.
Comment réagir à cette déroute ? Ce fut le Mox – combustible mixte où 8,5% de plutonium se combine à de l’uranium appauvri… selon le principe des combustibles prévu pour les «rapides» – mais que l’on peut utiliser dans les réacteurs « lents » avec cette proportion. Sans une once de retenue, voila donc les ingénieurs du nucléaire posant aux «écolos» puisqu’ils «recyclent» leurs déchets, comme le compost du jardin. Un langage publicitaire peu honnête, car le devenir réel des centaires de tonnes de plutonium des combustibles repose sur des décisions énergétiques – construire des réacteurs rapides – qui seront prises dans plusieurs décennies… ou pas. Surtout que recycler le Mox en réacteurs lents n’est pas impossible, mais sa teneur accrue en plutonium-242 «dégrade» sa capacité à fissionner. Cette solution ne peut être que transitoire, en attendant ces hypothétiques réacteurs rapides – objet d’une recherche internationale et baptisés «génération-IV».
Pourtant, la séparation du plutonium pour le Mox (fabriqué à l’usine Melox de Marcoule, photo) est devenue la raison d’être de La Hague, avec plus de 26.000 tonnes de combustibles retraités.
Les clients ? 5.483 tonnes pour les Allemands «qui en recevront jusqu’en 2018», précise Mockly. Environ 700 tonnes pour les Belges et les Suisses, mais c’est fini. Quelques centaines pour les Pays-Bas et l’Italie. Les Japonais pour un peu moins de 3.000 tonnes mais personne ne sait ce qu’ils vont décider après la catastrophe de Fukushima.
Tout le reste est pour EDF qui a signé «un contrat allant jusqu’à 2040, mais les tonnages sont décidés tous les cinq ans» selon Mockly – date probable de «l’obsolescence des équipements actuels» ajoute Lionel Gaiffe. Aujourd’hui, environ 1.100 tonnes par an sont retraités (contre 850 tonnes ces dernières années), alors qu’EDF décharge en moyenne 1.200 tonnes de combustibles par an. Logique, car pour éviter de se retrouver avec du plutonium «sur étagère», ne sont retraitées que les quantités correspondant aux Mox commandés par EDF. Du coup, les piscines de La Hague sont à quelques années de la saturation, même s’il existe des solutions techniques pour retarder la nécessité d’en construire d’autres.
Le paradoxe de l’enfer nucléaire. «Dans un de ces puits, nous glissons 9 conteneurs de déchets vitrifiés, soit six mois de fonctionnement d’un réacteur de 900 MW d’EDF.» Lionel Gaiffe se trouve alors dans une des salles où sont entreposés les «déchets ultimes» (photo).
Fondus dans des matrices de verres, les produits de fission (césium, strontium…) et les actinides mineurs (neptunium, américium, curium) constituent l’enfer nucléaire forgé par les réacteurs des centrales. Seulement 4% du combustible usé, mais enfer nucléaire puisque la radioactivité de ces cylindres de verres d’1,30 m sur 40 cm de diamètre se compte en pétabecquerels (un péta c’est un million de milliards).
Pourtant, on se déplace sans protection radiologique sur un plancher de béton de deux mètres d’épaisseur, seule protection contre le dit enfer (photo ci dessus). Ces déchets porteurs de tous les mythes et discours apocalyptiques – ils vont «empoisonner la Terre pour des millions d’années», s’alarment les opposants – n’exigent pour leur refroidissement (500°C au cœur, 300°C en surface) qu’une circulation d’air, forcée ou générée par les écarts thermiques entre haut et bas du bâtiment.
Si ces déchets vitrifiés sont terriblement irradiants, ils sont inertes, «sans contamination, et seraient capables de défier les centaines de milliers d’années, comme leurs analogues naturels (des obsidiennes) enfouis à -500 mètres dans la couche d’argile de Bure si le parlement le décide». Lionel Gaiffe se plaît à opposer la «solution de La Hague» à la situation américaine. «Ils ont dépensé autant voire plus d’argent que nous, et se retrouvent avec leurs combustibles usés et aucune solution de gestion des déchets».
Cette «solution» suppose la manutention des déchets vitrifiés. Qui n’est pas sans défaut, puisqu’un conteneur a échappé à la pince du robot qui les dépose au fond des trous. Une autre fois, c’est le «bouchon» du trou qui a été oublié. Dans le futur stockage géologique, il faudra s’assurer contre de tels défauts, construire une «chaîne» garantissant que l’irradiation sera toujours sous cloche, jusqu’au dépôt dans une alvéole creusée dans la roche.
Le paradoxe chinois. Avant la catastrophe de Fukushima, le discours était à la renaissance du nucléaire. Boostée par l’appétit féroce de la Chine, où se construisent 27 des 64 réacteurs nucléaires en chantier dans le monde, l’industrie nucléaire se voyait «roi du pétrole» du 21ème siècle. Huit mois après Fukushima, Areva se fait sermonner par le gouvernement pour une menace de suppressions d’emplois. Mais l’industrie nucléaire doit-elle se préparer à un nouvel «hiver», comme pour les 20 ans post-Tchernobyl ? Pas certain.
Certes, l’Allemagne et plusieurs petits pays européens ont annoncé leur «sortie du nucléaire». Mais le gouvernement britannique n’a pas abandonné ses projets. Les Etats-Unis hésitent. Ils ont gagné quelques années avant de décider ou non de renouveler leurs centrales nucléaires en raison de leurs ressources en gaz non conventionnel. En août 2011, la Tennessee Valley Authority engageait près de 5 milliards de dollars pour finir la construction de la centrale nucléaire de Bellafonte. Le tabou du retraitement, posé par la «doctrine Carter» a sauté, avec la construction d’une usine de fabrication de Mox… à partir du plutonium militaire issu du démantèlement des armes nucléaires. En Russie, en Chine, aucun signal de renoncement aux ambitieux plans pour l’énergie nucléaire. Même climat en Inde.
Surtout, Areva négocie avec la Chine – en position favorable grâce à son monopole technologique – un contrat de «plusieurs milliards d’euros», glisse Mockly, pour la construction d’une usine de retraitement et d’une autre de fabrication de Mox. Le principe en serait acté, y compris le non-transfert de technologie sur certaines «boites noires» du procédé, plus pour des raisons commerciales que de non-prolifération militaire, puisque, de toute façon, la Chine possède déjà la bombe atomique.
Le paradoxe de la sécurité. Si le potentiel de radioactivité de l’usine est énorme, les mesures de radioprotection sévères, les accidents du travail les plus fréquents sont… «les chutes de plain-pied», assure Gaiffe.
Le visiteur ne risque pas d’oublier qu’il côtoie le risque nucléaire. L’accès aux zones contrôlées se fait après passage au vestiaire où l’on ne conserve que son caleçon. Chaque entrée s’effectue par un sas. Chaque sortie exige un contrôle de radioactivité sur les mains et les pieds, ou le corps entier. Cet arsenal est efficace, assure l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire. En 2010, pour les 3.163 personnes du retraitement des combustibles, la dose moyenne se limite à 0,04 millisievert durant l’année. La plus faible de toutes les activités nucléaires (fabrication du combustible, réacteurs d’EDF, enrichissement de l’uranium…). La raison ? Procédés et manutentions se déroulent en milieux confinés, par des systèmes automatisés pilotés depuis des salles de commandes éloignées de la radioactivité
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Les contre-exemples n’affaiblissent pas le paradoxe. Les salariés des entreprises prestataires reçoivent des doses cinq fois plus élevées selon le rapport de 2008 (0,24 millisieverts par an) ? Certes, mais c’est 10% de la radioactivité naturelle. Les accidents de radioprotection ? Survenus en 2002, 2006, 2008, 2009, ils sont rares et de faible intensité radiologique. Le plus controversé ? En 2006, lorsque deux techniciens nettoient une cuve à l’arrêt depuis 1998. Défaut d’organisation ? Mauvaise préparation ? Non-port de masque ? Une instruction judiciaire est en cours pour «blessures involontaires». La manière dont cet accident a été géré par la hiérarchie de l’entreprise montre toutefois une incapacité récurrente à traiter ce genre d’accident.
Lorsque la nuit tombe sur l’usine, on aperçoit un halo lumineux vers le sud. C’est le chantier de l’EPR de Flamanville. «L’EPR peut fonctionner sans Mox, mais si on le charge à 100% de Mox, c’est l’équivalent de ce que l’on met dans 5 des 20 réacteurs 900 MW actuellement utilisés pour ce combustible», précise Mockly. On comprend mieux l’acharnement d’Areva à le défendre: si des EPR remplacent, même à raison d’un pour trois, les réacteurs qui seront arrêtés d’ici 2025 selon la proposition de François Hollande, c’est l’assurance-vie de son usine normande pour les décennies à venir. Sinon, il faudra que le « moxage » des réacteurs toujours en service soit décidé.
En tous cas, personne n’imagine que les réacteurs rapides ne soient en service avant 2040/2050. Et leur construction ne pourrait se faire que petit à petit. Une telle stratégie énergétique sur largement plus d’un demi-siècle est-elle discutable et décidable, ou refusable, dans un débat politique scandé par des élections quinquennales ? Quelle que soit la décision, c’est là un défi assez redoutable.
(sciences.blogs.liberation.fr) Sylvestre Huet, le 22 décembre 2011
Fukushima: 40 ans de travaux pour démanteler la centrale
Le gouvernement japonais a décrété, vendredi, l’état d’arrêt à froid des réacteurs accidentés de la centrale nucléaire. Une étape qui marque la stabilisation du site et ouvre la période de préparation du démantèlement.
Vue partielle de la centrale de Fukushima Dai-ichi, le 12 novembre 2011 à Okuma, au Japon.
Le démantèlement de la centrale accidentée de Fukushima s’étalera sur une durée de 40 ans, compte tenu de l’état désastreux du site et des techniques nouvelles nécessaires, a prévenu mercredi le gouvernement japonais en présentant un échéancier de travaux.
«Le travail se fera en plusieurs étapes», a expliqué Goshi Hosono, ministre de l’Environnement chargé de l’accident.
Le retrait du combustible usé des piscines de désactivation devrait débuter dans deux ans (pour le réacteur 4) et durer plusieurs années pour être totalement achevé. Durant ce délai seront également renforcés les systèmes de refroidissement pour les réacteurs et piscines ainsi que les diverses installations.
L’extraction du combustible fondu dans les réacteurs 1 à 3 sera mise en oeuvre dans dix ans, et durera plus de deux décennies. Le traitement des eaux contaminées accumulées sur le site et stockées dans des réservoirs devra aussi être terminé dans ce laps de temps.
Pour toutes les tâches, des techniques nouvelles seront nécessaires, selon le ministre de l’Environnement, la situation à Fukushima étant inédite, avec des bâtiments détruits, un niveau de radioactivité élevé et du combustible tombé en tout ou partie sur le plancher de béton de l’enceinte de confinement dans trois réacteurs sur les six du complexe. «La récupération des débris du combustible va être extrêmement difficile. Cela va exiger des moyens techniques particuliers et, sans robots, une telle opération sera impossible», a pour sa part commenté un directeur-adjoint de Tepco. «Nous allons travailler avec des entreprises japonaises et étrangères», prévoit un autre responsable de Tepco. «Il est en effet souhaitable que se nouent des coopérations internationales, les Etats-Unis, la France et d’autres pays étant prêts à aider les Japonais dans cette opération délicate», a indiqué à l’AFP un expert français du secteur.
Un groupe spécial de recherche et développement doit se pencher rapidement sur les besoins nécessaires.
«Effectuer les travaux sans générer de nouveaux risques»
Le démantèlement du site ravagé par le séisme et le tsunami du 11 mars dans le nord-est de l’archipel ne sera en conséquence pas achevé avant environ 40 ans, prévoit l’Etat. «Nous devons effectuer ces travaux en évitant de générer de nouveaux risques», a pour sa part insisté le ministre de l’Industrie, Yukio Edano. «Nous avons défini à chaque étape les critères décisifs pour la suite des travaux, ce sont des éléments très importants pour l’avancement du calendrier», a renchéri son collègue de l’Environnement.
Le gouvernement japonais a décrété, vendredi dernier, l’état d’arrêt à froid des réacteurs accidentés de la centrale de Fukushima, une étape importante qui marque la stabilisation du site et ouvre la période de préparation du démantèlement. L’état d’arrêt à froid, qui signifie le maintien de la température à l’intérieur des réacteurs sous 100 degrés Celsius et le contrôle des émissions radioactives, était un des objectifs clefs de «l’étape 2 du plan de travail» établi par la compagnie Tokyo Electric Power (Tepco) dans le but de venir à bout de cette catastrophe.
Parallèlement au démantèlement progressif, les autorités vont devoir s’occuper des alentours contaminés et de la population évacuée.
(AFP)